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Diversifier les entreprises pour éviter les burn-out

Performance économique, absentéisme de longue durée, nombre de burn-out et niveau de diversité sont étroitement liés en entreprise. C’est ce qui ressort d’une étude menée par Securex et GraydonCreditsafe, première étape avant la construction d’un modèle prédictif de la maladie. Un taux de rotation du personnel élevé ou une productivité en chute font partie des signaux d’alarme à surveiller.
Par Florence Thibaut
Temps de lecture: 4 min

Tous deux gros producteurs de données sur le marché du travail, Securex, un secrétariat social présent sur tout le territoire, et GraydonCreditsafe, spécialiste de l’analyse des données, ont choisi pour la première fois d’allier leurs forces afin d’analyser les potentiels liens entre burn-out, absentéisme et performance des entreprises. Une grande enquête a ainsi sondé près de 48.564 organisations dans tout le pays. « Il s’avère que celles dans lesquelles la diversité de genre est limitée présentent un risque de burn-out deux fois plus élevé que les autres. C’est le même ratio pour les entreprises qui réalisent moins de bénéfices », indique Eric Van den Broele, directeur R&D chez GraydonCreditsafe.

Dans la pratique, le taux de rotation du personnel, l’absentéisme à court et à long terme (plus de trois mois), ainsi que le nombre élevé de contrats flexibles et/ou précaires sont autant de facteurs qui créent un terreau propice au burn-out. « Les collaborateurs des entreprises performantes et plus rentables sont moins exposés au risque de développer la maladie », souligne Heidi Verlinden research project manager chez Securex.

Facture sociale et économique

On le sait l’absentéisme coûte très cher aux entreprises, qu’il s’agisse de courte ou de longue durée et ce depuis des années. En Belgique, son coût global a bondi de 40 % entre 2021 et 2022. « Cette augmentation est à mettre en rapport avec la progression de l’épuisement professionnel », note encore Heidi Verlinden. Entre 2016 et 2021, l’Inami a, de son côté, enregistré une augmentation de 46 % des maladies de longue durée pour cause de dépression et burn-out. En 2022, Securex évaluait le coût moyen d’un burn-out à 23.677 euros.

Heidi Verlinden, experte chez Securex.
Heidi Verlinden, experte chez Securex. - David Plas

« La manière dont la personne malade vit son travail est au cœur de la problématique, explique la spécialiste de SD Worx. L’absentéisme a toujours un impact négatif, s’il est inférieur à un mois, mais aussi s’il est supérieur à un an. Il y a des coûts directs pour la victime et ses proches, mais également des coûts sociaux indirects et des coûts pour les entreprises, par exemple, la charge de travail des collègues sous pression, le remplacement structurel de la personne ou encore la formation du remplaçant ».

« La rotation du personnel et l’absentéisme engendrent une chute de la productivité du travail et une détérioration de la santé financière des entreprises. Ce n’est pas une surprise, les entreprises en difficulté créent souvent des environnements de travail stressants et moins productifs, qui augmentent à leur tour le risque de maladie », complète Eric Van den Broele. Ainsi, les 25 % des entreprises les moins rentables ont 1,47 fois plus de risques de cas de maladie de longue durée que les 25 % les plus rentables. Aussi, plus l’entreprise est grande, plus le risque de burn-out est élevé.

Moins de diversité, plus de maladies

Autre constat sans appel, les entreprises avec une plus faible répartition des genres ont presque deux fois plus de risque (1,98 fois plus) de maladie de plus de trois mois, ce qui correspond souvent à un burn-out. « Je suis frappé que les entreprises dont les effectifs évoluent vers la parité présentent ensuite beaucoup moins de risque de burn-out, affirme Eric Van den Broele. Cela montre que les objectifs de transition ESG sont incontournables et, in fine, rendent nos entreprises plus rentables. » On notera également que les entreprises avec les 25 % de salaires bruts les plus élevés sont presque deux fois plus productives que celles qui ont les 25 % de salaires les plus bas.

Recommandations claires

Face à ces résultats, les deux partenaires souhaitent construire d’ici la fin de l’année un modèle prédictif des maladies de longue durée, notamment sur base de données liée à la performance et à l’absentéisme. « Nous travaillons sur un instrument qui pourrait évaluer le risque de voir les burn-out se multiplier dans une entreprise afin qu’elle puisse agir en amont et se réorganiser de manière positive. L’idée est aussi d’imposer le sujet de la santé au travail en conseil d’administration. Le lien entre approche humaine et rentabilité est désormais clair », partage Eric Van den Broele.

« On pense encore trop souvent qu’investir dans le bien-être de ses collaborateurs ne se traduit pas par des bénéfices nets plus élevés, pointe Heidi Verlinden. Des équipes en bonne santé, compétentes et engagées ont tendance à rester plus longtemps dans l’entreprise et risquent moins de tomber malades. Cela nécessite parfois que l’entreprise intervienne sur des enjeux a priori privés ».

Parmi les recommandations du duo pour prévenir la maladie, on retrouve la défense d’une culture d’entreprise inclusive et mixte, la santé financière optimale dans la mesure du possible et une politique solide de gestion de la rotation du personnel, des départs anticipés et de l’absentéisme, par le biais d’entretiens de départ ou par une enquête poussée sur les causes de ces démissions. « Tout ceci démontre que l’attention portée à la diversité et au bien-être est une condition préalable à la santé financière d’une entreprise, comme à la santé de ses employés. C’est un cercle vertueux à mettre en place », résume Heidi Verlinden.

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